Homélie pour le troisième dimanche du Carême – 20 mars 2022
Exode 3, 1-8a.10.13-15 / Psaume 102 (103) / 1 Corinthie s 10, 1-6.10-12 /Luc 13, 1-9
L’urgence de nous convertir!
L’histoire de ce figuier me rappelle celle d’un prunier que j’ai planté chez nous. Après cinq ou six ans, c’est toujours le même problème. Pas de fruit! Zéro prune! Je ne sais plus quoi faire. Dois-je garder espoir et patience? Nous reviendrons sur le sort du figuier de la parabole. Pour l’instant, revenons aux tragédies et autres malheurs dont il est d’abord question dans l’évangile de ce jour. Des accidents, des tragédies, il en arrive souvent. Les médias nous en informent régulièrement. Les questions viennent vite : Pourquoi eux? Pourquoi les tragédies humaines, les attentats, les catastrophes naturelles? Tous ces malheurs ont-ils un sens? Est-ce le hasard? Une fatalité? On se dit que rien n’arrive sans cause! On disait autrefois, et certains le pensent encore, que c’est une punition du bon Dieu, un châtiment qui arrive à celui qui a commis une faute. Et nous imaginons alors Dieu comme un être sévère, punitif, cruel. Un dieu qui fait peur!
Jésus pourtant, alors même qu’il évoque des faits réels et tragiques, nous détourne d’une pensée qui mettrait le blâme ou la responsabilité sur Dieu. « Pensez-vous, demande-t-il, que ces gens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres pour connaître un tel sort? » Et le Seigneur s’empresse de répondre : « Pas du tout! » Il le répète avec fermeté et insistance : « Pas du tout! »
Seulement, il ajoute avec force, à deux reprises : « Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même ». En voulant dire : la soudaineté des accidents ou des tragédies qui arrivent, et qui vous choquent, devrait vous pousser à vous convertir, à ne pas attendre, pour ne pas périr à jamais.
Ce dont Jésus veut nous garder, c’est d’une mort éternelle; ce dont il nous parle c’est d’une conversion salutaire, qui consiste à tourner notre cœur et notre esprit vers Dieu, à mettre notre confiance en lui, à prendre en lui une assurance pour notre vie. Il ne faut pas nous éloigner de Lui, en nous attardant sur des sentiers d’injustice, d’égoïsme et d’orgueil. Ce serait un chemin de perdition, une route de malheur et de mort.
Nous convertir! Peut-être que ça nous fait peur, que ça nous paraît compliqué, difficile, hors de notre portée, trop exigeant? Et pourtant, il ne s’agit ni d’un effort surhumain, ni de bouder le plaisir, ni de mener une vie impossible. Bien sûr, la conversion changera des choses dans nos comportements, mais ce sera pour le mieux, pour la joie, pour la paix, pour un amour plus beau et plus grand que jamais.
La conversion commence par le cœur. C’est une histoire d’amour! Il s’agit de nous ouvrir à l’affection d’un Dieu qui veut nous parler, qui se fait proche, qui brûle d’amour pour nous et pour le monde. Rappelons-nous le Buisson ardent du livre de l’Exode (en 1ère lecture). Nous convertir, c’est ouvrir notre cœur, nos oreilles intérieures et les yeux de nos pensées à Celui qui le premier nous a aimés. C’est nous jeter dans ses bras de Père! C’est accueillir Jésus, le Fils bien-aimé, son envoyé, pour l’écouter et le suivre!
Tout le reste, les changements dans notre vie, cela viendra comme naturellement, à son heure, selon nos capacités et les situations où nous sommes. Nous convertir à ce Dieu d’amour, ce n’est pas d’abord gagner des mérites, ni même faire des sacrifices, ou bien mener une vie ennuyeuse. C’est d’abord un abandon, une libération, un retournement du cœur, un amour qui nait et grandit en nous, et qui change tout de notre vie. C’est l’effet d’un coup de foudre qui nous emporte vers Dieu et le prochain, le cœur plein d’amour, plus que jamais!
Le Seigneur nous rappelle aujourd’hui qu’il n’est pas trop tard pour nous convertir. Il nous attend. N’est-il pas tendresse, patience et miséricorde? Voici qu’il s’est mis à notre portée. Il nous a pris par la main en Jésus. La mort et la résurrection du bien-aimé Jésus, c’est la preuve suprême de l’amour dont nous sommes aimés de Dieu. Le Mystère de Pâques est au cœur de notre conversion, de cette Nouvelle Alliance où nous sommes, de nos engagements et de notre service. Le Christ Sauveur nous donne de communier à sa propre vie de Ressuscité dans l’Eucharistie qui nous rassemble en son nom. De l’arbre de la Croix nous vient la sève de l’Esprit, qui donne au pauvre figuier que nous sommes de porter enfin les fruits attendus.
Fr Jacques Marcotte, O.P.
Québec, QC