Homélie pour le premier dimanche du Carême – 21 février 2021
Genèse 9, 8-15 / Psaume 24 (25) / 1 Pierre 3, 18-22 / Marc 1, 12-15
Les yeux fixés sur l’Arc-en-Ciel de Dieu!
Jeudi dernier (18 janv. 21) un engin nommé Persévérance s’est posé sur la planète Mars après un voyage d’un peu moins de 7 mois depuis la Terre. Quand on a pu confirmer l’arrivée réussie sur Mars, ceux qui veillaient sur l’odyssée du robot depuis le 30 juillet ont sauté de joie. Ils avaient bien raison d’exulter après un tel suspense!
Depuis la fin du mois de janvier, les amateurs de la navigation à voile, eux, surveillent l’arrivée des coureurs du Vendée Globe. Les gagnants ont mis plus de 80 jours pour compléter l’épreuve en solitaire, sans escale ni assistance. L’aventure de ce tour du monde par les mers du sud est toujours éprouvante. Les conférences de presse à leur arrivée révèlent le vécu héroïque des participants. Deux fois 40 jours, c’est assez pour aller au fond de soi-même, connaître ses forces et ses limites, goûter à des joies immenses, vivre entre la peur au ventre et l’émerveillement total! Ressentir au retour et la nostalgie et le besoin pressant d’en partager les merveilles.
Ces deux histoires extrêmes ne sont pas sans ressemblance avec ce que l’Évangile nous rapporte de Jésus aujourd’hui poussé par l’Esprit au désert. Là, le Seigneur se retrouve seul, dans une nature austère, pleine de dangers. Il prend la mesure de sa condition humaine et de la dure réalité où il est plongé. Il éprouve ses forces et ses limites. Mais Jésus n’est pas seul au désert. L’Esprit qui l’anime, atteste que le Père veille sur lui. On peut penser que sa relation de Fils bien-aimé avec le Père permet à Jésus de vivre un moment exceptionnel et véritablement fondateur. Une expérience qui sera à la source de ce qu’il dira et fera par la suite.
Saint Marc est bien discret sur ce temps du désert. Il évoque d’un mot les épreuves de Jésus. La suite de l’Évangile cependant dira comment Jésus déjoue les pièges du tentateur et se garde fidèle jusqu’à la fin. Au désert, l’évangéliste évoque plutôt le cadre idyllique dans lequel Jésus évolue. Ce qu’il en reste, c’est l’expérience
heureuse d’une communion entre le Père et le Fils dans l’Esprit. Il en reste le charme de vivre en paix avec les bêtes sauvages et le bonheur d’être servi par les anges. J’aime voir un lien essentiel entre cette expérience initiatique de Jésus au désert et la suite, où il se projette avec force dans la Mission d’annoncer le Royaume qui vient, de prêcher une conversion pour chacun, vue l’urgence pour le peuple juif et pour toute l’humanité d’accueillir la Bonne Nouvelle du Salut et d’y croire.
L’aventure spirituelle que le Christ a vécu au désert nous est proposée à nous aussi, si nous voulons bien nous y engager à la suite du Christ. Le temps du carême qui commence nous en donne l’occasion. Le carême 2021, comme celui de l’an passé, ne sera pas pareil aux autres, on le sait. À cause, bien sûr, du contexte pandémique où nous sommes. Le désert, n’est-ce pas un peu ce confinement auquel nous sommes voués depuis un an? Nous n’avons pas à courir loin pour y être. Ce désert, il est même en train de s’éterniser, on dirait.
Pourtant avec Jésus, notre Seigneur et Sauveur, nous allons vivre cette situation dans la paix et la joie d’un grand amour. Le plus seul d’entre nous n’est pas seul, s’il prend Jésus avec lui dans la barque! Si nous sommes en bulle, conjugale, familiale ou autre, nous pouvons vivre aussi de bons moments avec lui. Il nous offre inlassablement son amitié personnelle; il nous dit les mots qui rassurent; il nous mène au dépassement.
Avez-vous remarqué que, depuis le début de la pandémie, nous avons un peu perdu le sens du temps et des saisons? Nous vivons dans un monde devenu sans couleur et sans avenir. C’est que nous sommes accaparés par les détails tatillons d’un quotidien devenu imprévisible! Or, en vérité nous pouvons nous remplir le cœur et l’âme de Dieu lui-même, en pensant à notre Seigneur Jésus. N’est-il pas l’arc-en-ciel de Dieu posé sur les nuages? N’est-il pas le Don de Dieu et le Pain de vie? Il est notre espérance! Il nous redit que Dieu nous aime, qu’il est miséricorde et pardon, qu’Il nous donne force et lumière pour persévérer dans la Foi!
Fr Jacques Marcotte, O.P.
Québec, QC