Homélie du 2ème dimanche de l’Avent - 4 décembre 2022
Isaïe 11, 1-10 / Psaume 71 (72) / Romains 15, 4-9 / Matthieu 3, 1-12
Que vienne l’Esprit Saint et le feu!
Tout récemment, avec un groupe de priants du Rosaire, je visitais une résidence dédiée à l’accueil de gens en transition vers leur réinsertion sociale : des ex-prisonniers, des rescapés de la toxicomanie ou de l’alcoolisme. C’est à Québec, la Fraternité St-Alphonse, l’œuvre du Père André Morency, rédemptoriste. Ce prêtre nous racontait l’évènement qu’il a vécu l’été dernier quand le Pape François s’est arrêté chez eux lors de sa visite à Québec, le 28 juillet. C’était une surprise préparée de longue date par les soins de notre archevêque. La consigne étant que l’évènement devait être gardé secret, il fallait préparer ce beau monde à cette visite sans leur dire qui allait venir. Le Père Morency nous racontait comment il lui a fallu jouer d’astuces pour que tous soient là, fin prêts, le moment venu. Cette situation vécue m’a fait penser à l’œuvre du Prophète Jean Baptiste préparant tout le peuple au mystère d’une visite dont il était mystérieusement averti.
Nous retrouvons donc le rude personnage, vêtu d’une peau de chameau, ceinture de cuir sur les reins, nourri de sauterelles et de miel sauvage. Rien de bien raffiné! Son message pourtant passionne les gens. « Convertissez-vous, car le Royaume des Cieux est tout proche ». Comme s’il leur disait : Quelqu’un d’important va venir. Il faut vous renouveler en profondeur. Ce message a résonné fort dans leur cœur. Voici que Jean était débordé par l’affluence de ceux et celles qui se préparaient à bien accueillir Celui dont il leur disait seulement qu’il était plus fort que lui, tellement que Jean n’était même pas digne de dénouer la courroie de ses sandales.
Le prophète Isaïe nous a parlé, dans la première lecture, d’un rameau sorti de la souche de Jessé, père de David, disant que sur lui reposerait un esprit de sagesse et de discernement, de conseil et de force, d’intelligence et de crainte de Dieu. Le prophète insistait sur les qualités de ce personnage mystérieux, un modèle de justice, de compassion, de respect du droit. Il incarnerait un monde harmonieux d’où le mal serait extirpé. Le prophète évoquait avec émotion ce paradis retrouvé où le loup habiterait avec l’agneau, le léopard se coucherait près du chevreau. C’était l’annonce d’une transformation inouïe.
Cette vision idyllique sera-t-elle un jour la réalité? Nous aspirons tous à une telle harmonie. Nos réflexes de peur et d’attaque et de riposte prennent cependant le dessus, Et c’est la discorde et la guerre! La Parole de Dieu nous met au défi d’espérer la Paix malgré tout. Elle nourrit en nous le désir d’un monde meilleur. Elle nous invite à y croire et à espérer vivre un jour le règne promis. Saint Paul dans la 2e lecture le confirme : « Tout ce qui a été écrit à l’avance dans les livres saints l’a été pour nous instruire, afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures, nous ayons l’espérance ».
Lire et relire les Écritures pour en accueillir les promesses, n’est-ce pas là faire grandir en nous l’Espérance? N’est-ce pas un chemin ouvert pour notre conversion? Il est fidèle et miséricordieux le Seigneur des promesses. Mettre en lui notre espérance, n’est-ce pas nous ouvrir sur l’infini du possible et de l’impossible? Si le Fils de Dieu est venu en notre chair, c’était pour accomplir les promesses de ce monde nouveau. Jésus en a promulgué la loi : c’est l’unique commandement de l’Amour. Plus même que des paroles et des consignes, dans sa personne il nous a donné l’exemple à suivre. Il nous a montré le chemin de l’amour vrai, de la compassion, de l’humilité, du pardon. Il faut nous convertir à ces valeurs d’Évangile et prendre ce chemin de grâce. C’est la mission de Jean Baptiste, de nous appeler à une telle conversion, au redressement en profondeur de nos vies.
Le Père Morency, nous disait que dans la Fraternité St-Alphonse, malgré le fait que le projet soit pour l’excellence de la communauté, pour l’harmonie d’un vivre ensemble exemplaire, il lui fallait parfois se montrer exigeant, rigoureux et sévère. De même, on l’a vu dans l’Évangile, les mots du Précurseur sont rudes et violents. Il n’y a pas de passe-droit dans le Royaume! Chacun doit répondre de l’état de son cœur et de la vérité de son engagement. La présence des Sadducéens et des Pharisiens dans la foule de ceux qui viennent vers lui n’impressionne pas le Prophète au point qu’il se taise. Ils doivent eux aussi s’examiner et se convertir en vérité. La véritable conversion produit de bons fruits : l’humilité, la pureté des mœurs, la pauvreté du cœur, l’abandon à la miséricorde de Celui qui, dans la puissance de l’Esprit, prépare lui-même tous ses amis, tous ses enfants, à vivre la glorieuse Venue de son Fils bien-aimé dans leur cœur.
Fr Jacques Marcotte, O.P., Québec, Q